Jurassic World : Au royaume des suites et reboots

Jurassic World : Au royaume des suites et reboots

L’une des sorties ciné les plus attendus de 2015, c’est bien évidemment Jurassic World. L’outsider prouve que les franchises cultes ne sont jamais réellement enterrées. L’occasion d’un bon gros dossier sur ces résurrections que l’on attendait plus.

 

Indiana Jones

Une trilogie devenue représentative d’un état d’esprit typique du cinéma de divertissement des années 80. Resucée des serials exotiques digérés à la sauce d’un James Bond, dirigés d’une main de maître par Steven Spielberg. Un premier film matriciel du cinéma d’aventure moderne, nominé aux oscars pour sa maîtrise formelle et narrative impressionnante; un second opus en forme de rollercoaster définitif, agrémenté d’une cruauté et d’une violence bon-enfant salvatrice; un troisième épisode vu comme un faux remake parodique et pensé comme une vraie déconstruction mythologique, peut être moins trépident mais porté par un climax émotionnellement implacable. Il aura fallut attendre près de 20 ans pour que Steven Spielberg daigne revenir à l’aventure. Si le succès du Royaume du crâne de cristal fut au rendez-vous, la réception critique beaucoup moins positive que prévue. Une orientation science-fictionnesque que certains ne lui auront jamais pardonnés, un John Hurt en roue-libre rappelant aux mauvais souvenirs d’un Jar Jar, et l’avènement d’un Shia Labeouf non désirée auront eu raison du film. Pourtant Steven Spielberg, Janusz Kaminski, Michael Kahn et John Williams prouvent que l’aventure n’a pas d’âge, offrant quelques morceaux de bravoure d’anthologie. On retiendra une scène d’ouverture démentielle, où le cinéaste emploie une scénographie impressionnante, rappelant qu’il est l’un des tous meilleurs réalisateurs en activité. Pas mal, pour un film conspué.

 

 

Die Hard

En 2007, Len Wiseman ramène John McClane à la vie. Si la réception critique est étrangement positive, et le succès véritablement au rendez-vous, le doute est permis quant à la légitimité de Wiseman aux commandes de cet épisode. Ce serait oublier la présence de Renny Harlin, autre yes-man d’une époque révoluée, sur un second opus certes sympathique mais très en déça de l’éminent Piège de Cristal. C’est que la saga Die Hard doit tout, ou presque, au génie de John McTiernan. Il y redéfinie les contours du cinéma d’action moderne à deux reprises, par une utilisation novatrice du décor comme un personnage à part entière. Une journée en enfer fait de cette idée sa principale force, course-poursuite effrénée au sein d’un New-York chaotique. La composition des cadres millimétrée et géométrique du premier opus laisse place à une caméra à l’épaule nerveuse instaurant un nouveau style de filmage dans un genre balisé. La progression verticale du premier film, huis-clos symphonique au son de la 9ème de Beethoven, laisse place à une avancée hasardeuse sur fond de Brahms. Un dytique fondamental qui ne s’embarrasse même pas de séquelles honteuses. Et oui, qui se souvient encore du funeste Die Hard 5 ?

 

 

Terminator

Curieuse saga dont l’idée même de continuité s’avère problématique. Pourtant, après avoir traumatisé une génération de spectateurs en 1984, James Cameron prend le public à revers. Il transforme sa fable cruelle en un monument du cinéma d’action, comme un remake bigger and louder qui détourne la logique du premier film (Schwarzy se transforme en père de substitution, le futur leader de la rebellion en ado rebel, le terminator de chaire et de métal en un ennemi de liquide et protéiforme, etc.). Surtout, il impose un nouveau standard visuel avec l’avènement du morphing. Le troisième opus signé Jonathan Mostow ne tentera même pas de reproduire les deux brillantes réussites de Cameron. Il se contentera d’une série B friquée et guerrière, s’installant dans l’univers très confortable de la destruction de masse. Une honnêteté qui rend sympathique ce petit ride, d’autant plus que la conclusion étonnamment désespérée surprend les spectateurs d’alors. Le Terminator Renaissance qui devait suivre aurait pu s’imposer comme un joli prolongement, mais rate la coche malgré l’investissement évident du réalisateur McG. Trop d’ambitions disparates et de chemins narratifs inaboutis laisseront ce nouveau projet de trilogie au placard. C’est dommage, car les promesses étaient belles. Maintenant, doit-on vraiment encore parler de Terminator : Genisys?

 

 

Mad Max 

Inutile de revenir sur le phénomène Mad Max, succès inespéré mais indispensable de l’une des plus grandes réussites de ces dernières années. Sorti il y a quelques semaines, cette course-poursuite insensée de deux heures s'est imposée comme une nouvelle date du cinéma d’action moderne, dont chaque plan titille la rétine. La franchise a beau être entrée dans l'inconscient collectif, on est bien loin loin d'un nom aussi fédérateur que Star Wars aux yeux du grand public. La réussite commerciale du film (bien plus importante à l'étranger qu'aux Etats-Unis) apparaît donc d'autant plus surprenante pour un revival aussi peu "attendu" à grande échelle. Un come-back qui trouve à sa source George Miller, réalisateur des trois premiers films (vous pouvez d'ailleurs relire notre dossier sur cet immense cinéaste hélas méconnu). C’est sur sa seule volonté que Fury Road a pu se monter, et c’est peut être ici que se situe la clé de la réussite. Un revival qui est née uniquement avec l’idée de poursuivre le travail entreprit des années auparavant; et ce, sans ne jamais chercher à surfer sur cette nostalgie inhérente aux reboots. Un film de son époque, bâtit sur des fondations bien plus anciennes. La définition même d’un revival?

 

 

Star Wars

Forcément, le film de J.J. Abrams s’impose comme le fantasme de geeks ultime. Le réalisateur parviendra-t-il à satisfaire les fans de la première heure, que la prélogie concoctée par George Lucas avait pu laisser de coté ? Pourtant, en dépit des défauts évidents des trois derniers films de la saga (ou premiers, c’est selon); George Lucas avait eu le mérite d’approfondir son univers sans ne jamais chercher à se satisfaire de ses acquis. Une recherche esthétique qu'on peut aimer ou détester, mais qu avait le mérite de se détacher considérablement de la trilogie originale. Seul les derniers instants de l’excellent La revanche des Sith ont usé de cette fibre nostalgique attendue pour raccrocher les wagons, et dont l’effet se retrouve finalement décuplé après trois films. Le Réveil de la force semble bien parti pour proposer un retour aux sources certes rafraîchissant, mais qui semble être la seule raison d’être de cette nouvelle trilogie. On compte sur le nouveau nabab pour éviter les pièges que Disney lui met sur son chemin.

 

 

En définitive, nos plus grandes sagas ne seraient-elles pas victimes de cette nostalgie qui paraît autant d’actualité ? I’ll be back; Yippee-ki-yay; Chewie, We’re home; autant de répliques cultes utilisées comme nouveaux artifices de communication. Terminator Genisys et Jurassic World se présentent d’ailleurs comme d’authentiques « faux remakes » pour lesquels la dimension d’hommage semble prévaloir sur tout le reste. Le cinéma n’a-t-il plus rien de neuf à offrir pour que tous les regards soient tournés vers les reliques du passé ? Mad Max nous a heureusement prouvé le contraire, mais la question mérite d’être posée.

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