On retrouve notre rubrique Ce soir à la télé avec la diffusion exceptionnelle sur Arte du chef-d'oeuvre crépusculaire de William Friedkin, Le convoi de la peur.
Remake du Salaire de la peur de Henri Georges Clouzot (diffusé hier soir sur la même chaine), Sorcerer sortit en 1977 dans l'indifférence la plus totale. Il faut dire que face à lui, un petit film du nom de La Guerre des Etoiles étant entrain de révolutionner malgré lui l'histoire. Une donnée qui tend à faire oublier la place unique qu'occupe le film de Friedkin dans le Nouvel Hollwood, voir dans le cinéma américain tout court. C'est seulement bien plus tard que ce dernier acquit sa renommée, accentuée par sa quasi-invisibilité en vidéo. En 2014, Friedkin pu ressortir son chef-d'oeuvre maudit dans une version intégralement remasterisée. L'occasion pour beaucoup de découvrir cette oeuvre majestueuse d'un auteur bien trop sous-estimé.
William Friedkin y dévoile une mise en scène virtuose et avant-gardiste, grace notamment à l'utilisation assez révolutionnaire de la caméra portée, dont Steven Spielberg retiendra même des leçons pour son immense Munich. Le convoi de la peur traine ses personnages jusqu’à l’épuisement dans une crasse étouffante, au cadre de plus en plus suffoquant. Film d’hommes sur la dualité, la corrosion des corps et la destinée, il s’inscrit dans la logique du cinéaste, tel un Exorciste délaissant son entité démoniaque pour une nature implacable. A la lisière du fantastique et du documentaire, le film est nourri de fulgurances dont on retient surtout la fameuse scène du pont suspendu, monument de mise en scène à la rythmique tétanisante. Un sommet de tension avant un final proche de la transe mais avant tout incroyablement désespéré.
Un chef-d’oeuvre séminal dont le tournage figure parmi l’un des plus éprouvants de l’histoire du cinéma. C’est cette force de conviction, ce méta-combat qui fait du film un sommet d’intensité jusque là inégalé.
Faudrait-il en rajouter pour comprendre que ce soir, à 20h50, ce sera Arte pour tout le monde ?